MESROU, MESRIN, ÉGLÉ, CARISE.
MESROU, de loin, voulant retenir Mesrin qui se dégage.
Il s’échappe de moi, il veut être inconstant, empêchez-le d’approcher.
CARISE.
N’avancez pas.
MESRIN.
Pourquoi ?
CARISE.
C’est que je vous le défends ; Mesrou et moi, nous devons avoir quelque autorité sur vous ; nous sommes vos maîtres.
MESRIN, se révoltant.
Mes maîtres ? Qu’est-ce que c’est qu’un maître ?
CARISE.
Eh bien ! je ne vous le commande plus, je vous en prie, et la belle Églé joint sa prière à la mienne.
ÉGLÉ.
Moi ? Point du tout, je ne joins point de prière.
CARISE, à part à Églé.
Retirons-nous ; vous n’êtes pas encore sûre qu’il vous aime.
ÉGLÉ.
Oh ! je n’espère pas le contraire ; il n’y a qu’à lui demander ce qui en est. Que souhaitez-vous, le joli camarade ?
MESRIN.
Vous voir, vous contempler, vous admirer, vous appeler mon âme.
ÉGLÉ.
Vous voyez bien qu’il parle de son âme ; est-ce que vous m’aimez ?
MESRIN.
Comme un perdu.
ÉGLÉ.
Ne l’avais-je pas bien dit ?
MESRIN.
M’aimez-vous aussi ?
ÉGLÉ.
Je voudrais bien m’en dispenser si je le pouvais, à cause d’Azor qui compte sur moi.
MESROU.
Mesrin, imitez Églé ; ne soyez point infidèle.
ÉGLÉ.
Mesrin ! l’homme s’appelle Mesrin ?
MESRIN.
Eh ! oui.
ÉGLÉ.
L’ami d’Adine ?
MESRIN.
C’est moi qui l’étais, et qui n’ai plus besoin de son portrait.
ÉGLÉ le prend.
Son portrait et l’ami d’Adine ! Il a encore ce mérite-là ; ah ! ah ! Carise, voilà trop de qualités, il n’y a pas moyen de résister ; Mesrin, venez que je vous aime.
MESRIN.
Ah ! délicieuse main que je possède.
ÉGLÉ.
L’incomparable ami que je gagne !
MESROU.
Pourquoi quitter Adine ? Avez-vous à vous plaindre d’elle ?
MESRIN.
Non, c’est ce beau visage-là qui veut que je la laisse.
ÉGLÉ.
C’est qu’il a des yeux, voilà tout.
MESRIN.
Oh ! pour infidèle je le suis, mais je n’y saurais que faire.
ÉGLÉ.
Oui, je l’y contrains ; nous nous contraignons tous deux.
CARISE.
Azor et elle vont être au désespoir.
MESRIN.
Tant pis.
ÉGLÉ.
Quel remède ?
CARISE.
Si vous voulez, je sais le moyen de faire cesser leur affliction avec leur tendresse.
MESRIN.
Eh bien ! faites.
ÉGLÉ.
Eh ! non, je serai bien aise qu’Azor me regrette, moi ; ma beauté le mérite ; il n’y a pas de mal aussi qu’Adine soupire un peu, pour lui apprendre à se méconnaître.
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